Tribune publiée sur Le Monde – Lobbying : « Pour des pratiques radicalement nouvelles et volontaristes en matière de transparence »

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Trois cent vingt-deux députés de la majorité présidentielle s’engagent dans une tribune au « Monde » à respecter la transparence de leurs agendas dans le cadre de leurs rencontres avec les lobbys et à indiquer les sources des amendements parlementaires.

« Tout parlementaire est libre de défendre un amendement qui lui a été suggéré, voire rédigé par Greenpeace, Monsanto, le Medef (…). Cela est légitime dès lors, selon nous, que cette démarche est totalement transparente. » (Photo : l’Assemblée nationale le 28 juin 2017.)

« Tout parlementaire est libre de défendre un amendement qui lui a été suggéré, voire rédigé par Greenpeace, Monsanto, le Medef (…). Cela est légitime dès lors, selon nous, que cette démarche est totalement transparente. » (Photo : l’Assemblée nationale le 28 juin 2017.) DPA / Photononstop

Tribune. Les organisations non gouvernementales Transparency International et WWF ont récemment appelé à faire la transparence sur le lobbying dans une pétition à l’attention des responsables politiques. Nous saluons cette démarche et voulons affirmer la nécessité absolue d’une évolution des pratiques publiques et politiques en matière de transparence ; une transparence qui n’est ni une « dictature de l’opinion » comme le dénoncent certains, ni une limitation de notre liberté parlementaire.

Car le monde change. Les politiques publiques, qu’elles soient locales ou nationales, qu’elles relèvent d’un exécutif ou du législateur, doivent se coconstruire. Elles associent aujourd’hui de plus en plus les parties prenantes, et évaluent avec elles leur impact pour s’améliorer continuellement. Cela signifie que l’intérêt général se construit dans le dialogue et l’écoute des citoyens, bien sûr, mais aussi avec des associations qui plaident pour une cause, telle que le développement durable – forte exigence citoyenne – ou des entreprises qui portent des intérêts économiques privés. C’est là le sens de la loi Pacte [plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises] : reconnaître la responsabilité sociétale des entreprises et les considérer comme des partenaires à part entière de l’action publique.

Une véritable exigence démocratique

Cette réalité rend plus que jamais indispensable une nouvelle approche des interactions des pouvoirs publics avec ce que l’on appelle pudiquement les « représentants d’intérêts » et plus communément les « lobbys ». Celle-ci doit se fonder sur l’absence totale de conflits d’intérêts, une prise de décision libre et non faussée, mais aussi sur une logique volontariste et assumée de transparence. C’est plus qu’une nouvelle approche méthodologique : c’est aujourd’hui une véritable exigence démocratique sur laquelle nous devons refonder l’action politique.

C’est pourquoi il nous faut développer de nouvelles pratiques politiques qui permettent à l’ensemble des citoyens de mieux comprendre la façon dont se construit la loi et de saisir la réalité des relations entre décideurs publics et représentants d’intérêts. En ce sens, la transparence des agendas des députés dans le cadre de leurs rencontres avec les lobbys est fondamentale. C’est en montrant ce que nous faisons au quotidien que nous parviendrons à redonner confiance aux citoyens dans l’action publique.

Il en est de même pour le sourcing des amendements, c’est-à-dire l’expression en toute transparence de l’origine de l’amendement porté par un parlementaire lorsque celui-ci a été proposé par un représentant d’intérêts. Tout parlementaire est libre de défendre un amendement qui lui a été suggéré, voire rédigé par Greenpeace, Monsanto, le Medef, l’association de défense des abeilles, le Comité national olympique, ou bien encore la Fédération des SCOP. Cela est légitime dès lors, selon nous, que cette démarche est totalement transparente. C’est le sens de l’initiative qu’ont pris plusieurs groupes politiques et de nombreux députés à l’Assemblée nationale en cette rentrée parlementaire.

Profondément attachés aux règles du jeu démocratique, il nous semble essentiel de promouvoir ces « bonnes pratiques » dans le cadre d’une démarche volontaire et non obligatoire. En effet, si nous en faisions des règles, cela impliquerait un contrôle et, le cas échéant, des sanctions par le bureau de l’Assemblée nationale – dont la composition reflète les équilibres politiques de l’hémicycle – contre des députés, y compris ceux de l’opposition. Ce serait alors une atteinte inacceptable à la liberté et à la démocratie. Seules deux options sont donc possibles : la démarche politique volontaire ou l’obligation dans des conditions très spécifiques (par exemple lorsque l’on accepte d’être rapporteur d’un texte).

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